Vous ne le saviez peut-être pas, mais il existe une Journée mondiale de sensibilisation à la maltraitance des personnes âgées, notamment en ce qui concerne la maltraitance financière à l’encontre des personnes âgées. Ces abus coûteraient environ 36,5 milliards de dollars par an aux personnes âgées américaines (pas de chiffres en France). Ils sont certainement sous-déclarés en raison de la honte et du manque de soutien qui suivent un vol ou une arnaque. Comment la reconnaître et comment se prémunir de ce risque à la fois matériel mais aussi psychologique ? Nous avons rédigé ce petit guide pour vous aider à mieux comprendre ce phénomène.

Maltraitance financière Image de Freepik

Phénomène mondial en pleine croissance, l’abus financier envers les personnes âgées est estimé à 36,5 milliards de dollars par an aux personnes âgées américaines. Ce chiffre est très probablement une estimation basse car les fraudes ne sont pas systématiquement signalées en raison de la honte d’être victime, du manque de soutien et, finalement, de l’absence d’incitation à le faire. En effet, signaler la fraude les fait revivre le traumatisme et n’affecte pas la récupération des fonds perdus.

En France, il est estimé que 33% des personnes âgées sont visées par des escroqueries. Parmi ce groupe, 15% des individus de plus de 65 ans déclarent avoir subit au moins une forme de maltraitance liée à l’argent. Certains parlent même d’un « fléau silencieux« . Ce rapport du Haut Conseil de la Famille, de l’Enfance et de l’Âge est à ce titre éclairant : https://www.vie-publique.fr/rapport/37380-les-maltraitances-financieres-legard-des-personnes-agees

Il n’existe pas réellement de guide complet sur le sujet de l’abus financier mais vous trouverez sur Internet quelques articles et ressources intéressantes plus particulièrement tournée sur vos droits, des cabinets d’avocats qui expliquent la procédure et vos droits, les conséquences psychologiques, etc. Cette page est donc complémentaires aux autres.

La maltraitance financière en France qu’est-ce que c’est ?

En France, la maltraitance au sens générique est catégorisée selon des paramètres établis par le Conseil de l’Europe en 1987. Elle est définie comme tout acte ou omission portant atteinte à la vie, à l’intégrité corporelle ou psychique, à la liberté, au développement de la personnalité ou à la sécurité financière d’une personne. Le Conseil de l’Europe a ensuite catégorisé ces actes comme suit :

  1. Violences physiques : incluent les coups, brûlures, ligotages, violences sexuelles, meurtres, etc.
  2. Violences psychiques ou morales : englobent le langage irrespectueux, dévalorisant, le chantage, les menaces, l’excès d’autorité, l’intimidation, etc.
  3. Violences médicales ou médicamenteuses : comprennent le défaut de soins de base, le manque d’information sur les traitements, l’excès de médicaments, le non-respect de la douleur, etc.
  4. Négligences actives : désignent le délaissement, l’abandon ou d’autres manquements effectués en conscience pour nuire.
  5. Négligences passives : résultent de l’ignorance et du manque d’attention de l’entourage.
  6. Privations ou violations de droits : impliquent la limitation de la liberté, la privation des droits civiques, religieux, etc.
  7. Violences matérielles et financières : concernent les actes portant atteinte aux biens matériels et à la sécurité financière.

Plus précisément, la maltraitance financière envers les personnes âgées englobe toute action entreprise par un tiers dans le but de manipuler ou de s’emparer des biens d’un aîné sans son véritable consentement, ce qui nuit à sa situation financière et matérielle. Les conséquences de tels agissements peuvent avoir un impact plus ou moins sévère sur leur bien-être financier. Évaluer l’ampleur de cette forme de violence, tout comme d’autres formes de mauvais traitements envers les personnes âgées, reste complexe. Selon l’Organisation mondiale de la santé, environ une personne âgée sur dix dans le monde fait face à des situations de violence chaque mois. D’après un rapport portant sur la réalité en France, près d’un tiers des aînés risquerait de subir des abus financiers, particulièrement ceux qui sont les plus vulnérables.

De quelles manières se manifeste la maltraitance financière envers les personnes vulnérables ?

La maltraitance pour des questions d’argent envers une personne âgée peut prendre une multitude de formes, allant des pratiques d’affaires abusives ou trompeuses aux comportements financiers néfastes à leur égard. Ceci inclut le vols de leurs biens personnels, espèces, moyens de paiement ou possessions, la privation du contrôle de leurs ressources, la restriction de l’accès à leurs comptes bancaires, les procurations utilisées de manière abusive, l’obtention de prêts non sollicités, les dons ou legs à des entités malveillantes, la confiscation de présents, l’intimidation, et bien d’autres.

La personne âgée ciblée par cette mauvaise gestion financière fait fréquemment l’objet de tromperies telles que l’extorsion de leurs assurances, les investissements inappropriés, l’occupation illégale de leur habitation, voire même la modification de leurs testaments.

On peut également parler d’abus de vulnérabilité, englobant des actions telles que la démarche de porte à porte et la vente forcée, la souscription à des abonnements superflus, l’entrepreneuriat de travaux exagérément chers, l’application de tarifs excessifs au sein d’une résidence pour personnes âgées par rapport aux prestations fournies, ou encore l’abandon d’un tuteur et de l’attention qu’il devrait accorder à une personne âgée sous tutelle.

En outre, la mauvaise utilisation financière envers les individus avancés en âge peut s’infiltrer dans le cadre d’une manipulation morale telle que l’usurpation d’identité sur des plateformes de rencontres en ligne, ou provenir d’organisations sectaires, se traduisant par l’appropriation illégitime d’un héritage, de dons et de legs, et plus encore.

L’exploitation financière des personnes âgées repose très souvent sur la relation de confiance développée avec l’individu responsable, qui exploite leur fragilité pour commettre des escroqueries. Cette relation de confiance a pour effet de réduire la prudence des personnes âgées, les rendant ainsi moins méfiantes, voire complètement désarmées face à ces situations.

Dans les services à la personne, en Ehpad ou au sein d’hébergements pour personnes en situation de handicap, il n’est pas exclut de rencontrer des situations telles que décrits ci-dessus. Les intervenants à domicile entrent dans l’intimité des personnes qu’elles accompagnent et peuvent utiliser leurs moyens de paiement pour les aider à réaliser les courses du quotidien. Les tentations existent et les abus financiers arrivent. C’est pour cette raison que nous avons créé Ezio pour nos clients professionnels, une solution de paiement pour les aidants professionnels. En 2022 déjà, nous avions réalisé une première enquête sur la qualité de vie au travail dans les services à la personne auprès des intervenants à domicile utilisant les cartes de paiement Ezio. Celle-ci avait pour objectif de quantifier et qualifier les avantages de cette nouvelle méthode de paiement.

Ainsi, nous avons pu constater que 63.8% des participants considèrent que la relation d’argent avec les bénéficiaires dont ils ont la responsabilité est gênante. Ces réponses reflètent une situation bien connue dans le secteur qui place régulièrement les intervenants à domicile dans l’obligation de demander un moyen de paiement aux clients pour aller faire les courses. Il peut en résulter une sorte de gêne ou de malaise qui « casse » la relation humaine alors qu’elle pourrait rester non altérée si les intervenants pouvaient faire autrement.

En Ehpad, la vulnérabilité des personnes est très importante et peut être un terrain favorable aux manipulations. Comprenez bien ici que nous ne pointons pas du doigt ce type d’hébergement, mais que nous serions tous de mauvaise foi de ne pas en parler. La vulnérabilité d’une personne, c’est l’absence de défense quasi-totale et toutes les personnes de la sphère personnelle comme de la sphère professionnelle ne sont pas toutes gouvernées par de bonnes intentions.

Pour les personnes en situation de handicap, les mêmes précautions devraient nous motiver. Maisons d’Accueil Spécialisées, Foyers d’Accueil Médicalisés, Foyer d’Hébergement, Maison d’Enfants à Caractère Social, toutes ces typologies de structures sont organisées pour accompagner au mieux les résidents. Leurs ressources sont gérées par les professionnels et souvent de manière « artisanale ». Ce n’est pas nous qui le disons mais nos propres clients. Ils manipulent les espèces et consignent les entrées et sorties sur des feuilles papiers ou des tableurs excels. Ces situations crées d’avantage de tentations et des contrôles difficiles à effectuer.

Quelles sont les raisons pour lesquelles les personnes âgées sont plus susceptibles d’être directement touchées par l’abus de faiblesse ?

Les personnes âgées peuvent être particulièrement exposées à l’abus de faiblesse lorsqu’elles se trouvent dans des situations qui accroissent leur vulnérabilité, notamment :

  • Vivre en solitaire : En 2018, 26,9 % des hommes et 61,5 % des femmes âgées de 80 ans ou plus vivaient seuls (source : Insee, Chiffres clés, août 2017 – juillet 2021) ;
  • Être socialement isolé en raison de cercles sociaux restreints ou d’une proximité géographique limitée due à l’avancement en âge, ainsi que des enfants vivant éloignés ;
  • Faire face à des faiblesses psychologiques ou physiques résultant d’une perte d’autonomie.

Un état d’isolement géographique, affectif ou social, ainsi qu’une perte d’autonomie, peuvent conduire une personne à accorder plus facilement sa confiance à quelqu’un qui établit un lien avec elle. Si cette personne a de mauvaises intentions, elle peut exploiter la situation pour obtenir des fonds ou des biens. Cette confiance est largement bénéfique pour la personne âgée, mais elle doit toujours se parer de vigilance.

Un documentaire très éclairant sur les arnaqueurs au SMS

Nous vous conseillons vivement de regarder ce documentaire sur l’ampleur du phénomène et les techniques récentes utilisées pour arnaquer. Nous avons trouvé ça fou de voir comment les escrocs sont organisés et surtout leur absence de scrupule. Considérez le comme un guide qui vous fera voir les SMS d’une toute autre manière.

« J’ai infiltré un réseau d’arnaqueurs au SMS » explore le monde des arnaques par SMS et leurs auteurs. Ce guide très technique dévoile les sinistres rouages ​​des réseaux cybercriminels à l’origine de ces arnaques, mettant en lumière les tactiques utilisées. La vidéo met en lumière la découverte d’un dispositif de capture IMSI avancé lors d’un contrôle de routine par la police, qui est utilisé pour intercepter les communications téléphoniques à proximité. L’appareil exploite les vulnérabilités des protocoles 2G pour capturer les SMS et les appels sans détection. La vidéo se penche également sur une affaire récente impliquant une opération d’escroquerie par SMS à grande échelle à Paris, où des criminels ont envoyé des messages frauduleux en se faisant passer pour des services officiels afin de voler des informations personnelles et des fonds. Ce documentaire vise à sensibiliser à ces arnaques et à inciter les personnes à partager leurs expériences pour lutter contre ce fléau. 

 

 

Malheureusement, le plus sûr aujourd’hui est de se méfier de tout. Les SMS vous demandant de régulariser des situations doivent systématiquement vous alerter, car c’est un mode de communication qui n’est généralement pas privilégié par l’administration. Également, ce n’est pas parce qu’il y a un logo officiel que l’email ou le site est sérieux. Même des personnes aguerries tombent dans le piège. Il est important de vérifier un grand nombre de paramètres avant de considérer que ce qui vous a été adressé n’est pas une fraude :

  • Sujet du mail : ce n’est peut-être pas évident pour tout le monde, mais si le sujet du mail ou du SMS est que vous avez gagné un lot à des jeux, fuyez ! Le classique message du paquet retenu qui vous demande de payer quelques euros est déjà maintenant dépassé. Qui c’est ce que seront les prochains sujets. 
  • Adresse email : vérifiez bien que l’email n’est pas loufoque, qu’il y a bien avant le @ un nom, prénom ou un no-reply, qu’après le @ il y a bien une structure d’adresse avec le nom de l’entreprise ou de l’administration (par exemple gouv.fr / impot.gouv.fr , etc)
  • Syntaxe : il y a toujours moyen de déceler des traces de formulation qui ressemblent pas au discours de la marque ou de l’administration qui vous parle. Des mots, des expressions, des ponctuations mal placées. Soyez vigilant à la tonalité du message par rapport à ce que vous avez déjà pu lire en tant que client d’un précédent message de cette même entité,
  • URL : c’est l’adresse Internet en haut dans votre navigateur. Regardez-bien si elle correspond à quelque chose d’officiel. Et même s’il vous semble que cette URL est officielle, regardez-bien en détail s’il n’y a pas une petite subtilité, une petite différence avec le vrai site.
  • Site Internet : les copies de sites internet sont vraiment très bien faites aujourd’hui. Promenez vous sur le site, cliquez sur tous les boutons et vérifiez que chaque page est bien détaillée. Il est toujours possible de déceler des petites erreurs de forme et de syntaxe.

Comme on le dit, la confiance n’exclut pas le contrôle.

Des répercussions psychologiques importantes et un manque d’information pour se défendre

Les séquelles vont bien au-delà du risque financier. Elles sont aussi psychologiques. Les escroqueries se déroulent souvent sur une certaine période (parfois des années), au cours de laquelle les auteurs préparent progressivement et isolent les personnes pour mieux les exploiter. Au moment où la fraude est découverte, elles ont été déjà été dépouillées de sommes d’argent importantes. Les personnes se trouvent ainsi en situation de grande détresse et de sentiment d’humiliation.

De plus, elles ont souvent besoin de savoir à qui demander de l’aide. Les fraudeurs opèrent avec des mécanismes sophistiqués et exploitent les dernières technologies disponibles, rendant difficile l’anticipation de leurs arnaques et la protection préventive des clients âgés.

Ils profitent également des failles légales pour commettre leurs crimes, en obtenant la participation involontaire de la victime. Par conséquent, les transactions bancaires illégitimes (par exemple, les virements effectués vers des pays douteux, les paiements envoyés à des bénéficiaires inconnus ou des montants de retrait totalement hors norme) ne peuvent pas être systématiquement stoppées par les institutions financières, car elles ont été légalement autorisées par la victime.

Réagir à la maltraitance financière envers les personnes âgées

Le maltraitance financière envers les personnes âgées est souvent discrète mais sérieuse. Selon le Code pénal, toute forme de maltraitance doit être signalée au Procureur de la République. Ne pas les dénoncer peut entraîner des peines de prison et d’amende.

Pour signaler la signaler, la personne âgée ou un témoin peut utiliser la plateforme d’écoute nationale dédiée aux victimes, en composant le 3977 ou en se rendant sur 3977.fr. Les dossiers seront traités par les autorités compétentes.

En cas d’urgence ou de maltraitance financière grave, contactez directement le Procureur de la République, la police ou la gendarmerie.

Nous vous conseillons également la lecture de cette page officielle du ministère des solidarités : https://www.pour-les-personnes-agees.gouv.fr/preserver-son-autonomie-s-informer-et-anticiper/les-mesures-de-protection/abus-de-faiblesse-des-personnes-agees-dans-quelles-situations

Votre assurance couvrent-elles les dommages liées à ces malversations ? Il faut leur demander clairement. Dans la plupart des cas oui, mais les procédures pour prouver le préjudice peuvent parfois être longues et les dossiers complexes à créer. Il existe des avocats spécialisés dans ces affaires.

15 juin, Journée mondiale de sensibilisation à la maltraitance des personnes âgées

Depuis 2006, le 15 juin a été désigné « Journée mondiale de sensibilisation à la maltraitance des personnes âgées » par le Réseau international pour la prévention de la fraude des personnes âgées (INPEA). Elle a été reconnue comme une journée des Nations Unies en 2011. Cette journée vise à nous rappeler à tous l’importance de prévenir la maltraitance des personnes âgées en général. Les escroqueries financières constituent une catégorie à part entière, en raison de son ampleur, de ses effets à grande échelle et de la complexité de sa détection ou de sa prévention. 

Présentation de l’Initiative Moonshot

Convaincu que la maltraitance financière des personnes âgées exige une attention accrue, un groupe de professionnels multidisciplinaires du monde entier a lancé un manifeste open-source, l’Initiative Moonshot – sous la direction de Ronald Long.

Leurs recommandations sont fondées sur 11 domaines clés qui exigent tous des efforts dédiés et coordonnés :

  1. Conscience – Accroître la visibilité de la maltraitance financière des personnes âgées
  2. Prévention – L’arrêter avant qu’elle ne se produise
  3. Signaux d’alerte – Identifier les premiers signes
  4. Systèmes et processus proactifs – Comment automatiser les alertes
  5. Que faire lorsque des signes sont détectés tôt – Étapes clés à suivre
  6. Communication – Nécessité de partager des informations
  7. Responsabilité – Conséquences pour les actions ou l’inaction
  8. Application – Utilisation de la loi dans toute son étendue
  9. Recherche – Collecte et partage de données quantitatives et qualitatives
  10. Législation – Dimensionnement et évolution des lois
  11. Technologie – Utilisation des innovations du 21e siècle

Nous espérons que ce petit guide sur les maltraitances vous aura apporté une partie de l’information que vous cherchiez afin de prévenir toujours plus le risque financier global pour vous et vos proches, à leur domicile ou en ehpad.