L’autonomie et la liberté financière des majeurs protégés est un sujet complexe où la bienveillance et le contrôle doivent coexister harmonieusement. Dans cet article, nous plongerons dans les défis rencontrés par les professionnels de ce secteur. Il est issu d’un entretien avec Laëtitia Godin, ancienne mandataire judiciaire à la protection des majeurs (MJPM). Nous explorerons les enjeux de la gestion financière, la nécessité de préserver l’autonomie et la liberté de décision des personnes protégées, et l’importance d’une approche humaine et respectueuse.

Les défis de la protection juridique : l’Importance de la Posture Professionnelle

Le rôle du MJPM est un « sacré métier », exigeant une grande responsabilité. La formation continue et la supervision sont essentielles pour naviguer dans les complexités de ce domaine. « On n’est pas suffisamment formé à la gestion de patrimoine », déplore-t-elle, insistant sur la nécessité d’une expertise financière solide.

Le turnover élevé dans les associations tutélaires est un défi majeur. « Les personnes changent tous les ans », ce qui nuit à la continuité de l’accompagnement. Laetitia Godin met en garde contre les risques d’une approche purement financière, axée sur la rentabilité, qui peut conduire à « ne pas prendre en compte certains besoins d’accompagnement ».

Liberté financière des majeurs protégés : accompagner à l’autonomie

La gestion financière des personnes vulnérables est un enjeu crucial. « L’argent, c’est ce qu’on a interrogé le moins », observe Laetitia Godin. Il est essentiel de comprendre les habitudes de consommation, les souhaits et les besoins de chaque individu.

Elle met en garde contre le risque de « conflit d’interprétation » avec les proches, qui peuvent avoir une vision différente de la manière dont l’argent doit être dépensé. « Il faut prendre le temps, mais il faut prendre en compte ces choses-là », insiste-t-elle.

Laetitia Godin préconise une approche collaborative, où la personne protégée est impliquée dans les décisions financières, dans la mesure de ses capacités. « Il faut lui donner les éléments, il faut pouvoir lui expliquer, lui donner les enjeux », explique-t-elle.

Autonomie et liberté : des principes fondamentaux à préserver

La protection juridique ne doit pas être synonyme de privation de liberté. « La liberté de dépenser son argent, même de manière impulsive ou ‘inutile’, fait partie intégrante de la liberté individuelle », rappelle Laetitia Godin.

Elle partage l’exemple poignant d’une personne qui ne se nourrissait que de nuggets, malgré les risques pour sa santé. « Elle disait ‘Je suis libre, je ne veux manger des nuggets' », raconte-t-elle. Respecter ce choix, tout en mettant en place un accompagnement adapté, est un défi majeur pour les professionnels.

Le bon dosage entre protection et autonomie

Laetitia Godin insiste sur l’importance de l’écoute et du dialogue. « Il faut beaucoup plus écouter, entendre », dit-elle. Comprendre les raisons derrière un refus ou une demande, même si elle semble irrationnelle, est essentiel pour construire une relation de confiance.

La protection juridique des personnes vulnérables est une mission exigeante qui nécessite un équilibre subtil entre protection et autonomie. Les professionnels doivent faire preuve de compétences financières, d’empathie et de respect pour accompagner au mieux les personnes dont ils ont la charge.

Laetitia Godin nous rappelle que « la liberté, c’est un concept ». Préserver cette liberté, tout en assurant la protection nécessaire, est un défi quotidien pour les MJPM. Grâce à leur expertise et à leur engagement, ils contribuent à permettre aux personnes vulnérables de vivre leur vie dans la dignité et le respect de leurs droits fondamentaux.

Note: Cet article s’appuie sur les propos de Laetitia Godin, ancienne MJPM, et vise à mettre en lumière les enjeux de la protection juridique des personnes vulnérables. Il ne constitue pas un avis juridique et ne saurait se substituer à une consultation auprès d’un professionnel qualifié.